[Littérature jeunesse – ado] Les dernières reines, Christophe Léon et Patricia Vigier

Le réchauffement climatique atteint des sommets dans cette zone équatoriale de l’Afrique où la forêt primaire n’est plus que résiduelle. L’agriculture intensive a investi toutes les terres disponibles et mobilise les dernières innovations technologiques – jusqu’à la pollinisation… Mais quand la fille du magnat de l’agroalimentaire achète sur le marché noir un mystérieux petit pot jaune à un séduisant africtiviste, un grain de sable s’immisce dans les rouages de la multinationale.

La catastrophe écologique qui se déclare risque de faire basculer de nombreuses vies, en direct sur les réseaux sociaux.

Mon avis :

Encore un roman de Christophe Léon que j’ai beaucoup aimé, mais la particularité de ce texte est qu’il a été écrit avec Patricia Vigier, que je découvre.

Nous sommes en Afrique, en 2049, où règne la multinationale Pionsanto, dirigée par Donald Prunt, un homme qui ne brille pas par son empathie et son altruisme… Il a une fille, Sunsee, qui a grandi dans la richesse et loin des informations réelles. Un jour, cette dernière échappe à la vigilance de son garde du corps et rencontre un garçon qui lui vend un pot de miel. Ravie de sa découverte, elle la montre avec joie à sa mère qui déchante et appelle aussitôt son mari, et pour cause : les abeilles sont interdites… Donald Prunt va tout faire pour découvrir la provenance de cet or jaune, tandis que Sunsee va ouvrir les yeux sur le monde tel qu’il est réellement. Elle sera sidérée par le nombre de personnes qui meurent à cause des produits que fabrique l’entreprise de son père, et se rangera du côté des opposants.

Ce roman est terrifiant : ce n’est pas un film d’horreur, loin de là, mais il est criant de réalisme et on ne peut s’empêcher de penser que les dérives actuelles pourraient nous emmener vers un tel destin. Après tout, sommes-nous loin de ce dirigeant avide de pouvoir ? Qui ne pense qu’en terme d’argent, de bénéfices ? Non. Alors, science fiction ou simple récit avant-gardiste ? Je poserais bien la question à des élèves de troisième, ou en lycée !

A retrouver sur le site de la maison d’édition Le Muscadier !

D’autres romans de Christophe Léon :

La décision

Pas bête(s) !

Argentina, Argentina

Fani

Hoax

Les mangues resteront vertes

[Jeunesse] La décision, Christophe Léon

 

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Surdoué du football, Zaïm, jeune orphelin syrien, est repéré dans un camp de réfugiés. Envoyé dans le centre d’entraînement d’un grand club à Stuttgart, il s’entraîne pour être le meilleur. Le garçon est promis à une grande carrière sportive et il est prêt à tout pour y arriver. Mais pour cela, Zaïm va devoir prendre une décision qui pourrait bouleverser toute sa vie…

Mon avis :

Voici une histoire courte, qui va directement à l’essentiel. Zaïm a toutes les prédispositions pour devenir un très grand joueur de foot. Recruté alors qu’il n’est qu’un garçon, il est conduit en Allemagne pour suivre un entrainement intensif. Il est ravi. Seul point négatif : il est trop maigre, mais il est prêt à avaler tout ce qu’on lui donnera pour se remplumer. Malheureusement, Zaïm va déchanter. Petit à petit il découvrira le revers de la médaille… Entre les aspirants grands joueurs, la solidarité n’est pas de mise. Est-il prêt à ça ?

Zaïm est un personnage courageux, il se rend compte que réaliser ses rêves n’est pas sans conséquence. Entre dopage, mensonge et manipulation, la découverte de la réalité pour le petit garçon est douloureuse.

Un roman paru aux éditions Oskar !

Christophe Léon c’est aussi …

[Jeunesse] Pas bête(s), Christophe Léon.

[Jeunesse / YA] Fani, Christophe Léon

[Jeunesse / JA] Hoax, Christophe Léon

[Jeunesse] Argentina, Argentina, Christophe Léon

[Jeunesse] Pas bête(s), Christophe Léon.

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Une poule pondeuse et frondeuse. Les pensionnaires étranges d’un zoo extraordinaire. Un mouton mégalomane. Un père et son fils en guerre contre les blattes. Un jeune cadre dynamique jouant les toreros. Les animaux curieux d’une ferme pédagogique ultramoderne. Un chien retraité pas mordu de téléréalité. Voilà les rencontres étranges que vous ferez dans ce livre.

Sept fables contemporaines dont les héros, qu’ils aient deux, quatre ou six pattes, n’agissent pas exactement comme l’on pourrait s’y attendre. Un savant mélange de raison et de folie, de causticité et de gravité, pour saliver de plaisir et se gratter la tête.

Mon avis :

Pas bête(s) ! regroupe sept nouvelles publiées dans les recueils Pense bêtes et Bêtes de pensée, qui étaient déjà parus au Muscadier.

Si les textes ne m’étaient pas tous inconnus, j’ai pris beaucoup de plaisir à en relire certains et à en découvrir d’autres. Les animaux sont au centre des nouvelles, mais pas pour des descriptions idylliques. L’auteur dénonce,  sur un ton caustique non dénué d’humour, les élevages actuelles qui ne sont pas conçus pour le bien-être des animaux, mais qui ne sont pensés qu’en terme de rentabilité. On ne peut s’empêcher de sourire à certains passages et de se désoler à la lecture d’autres.

Le point fort de Christophe Léon, c’est sa capacité à dénoncer quelque chose, sans être moralisateur. Ici, ce sont des constats accablants pour la plupart qui sont contés par les animaux. J’aime beaucoup l’idée que ce soit eux les narrateurs. Le lecteur est amené à se poser des questions sur les habitudes prises par certains agriculteurs mais aussi sur sa propre consommation.

En bref : un recueil savoureux et caustique, qui trouve parfaitement sa place dans la collection « Rester Vivant« .

D’autres romans de l’auteur :

[Jeunesse] Argentina, Argentina, Christophe Léon

[Jeunesse / YA] Fani, Christophe Léon[Jeunesse / JA]

Hoax, Christophe Léon

D’autres textes de la collection « Rester Vivant » :

[Jeunesse / ado] Station sous-paradis, Jean-Luc Luciani

[Jeunesse/ ado] Trouver les mots, Gilles Abier

[Jeunesse]La peau noire des anges, Yves-Marie Clément

 

 

[Jeunesse] Argentina, Argentina, Christophe Léon

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Pascal Forte prépare un article documenté pour le magazine qui l emploie. Sujet : les enfants volés par les militaires argentins durant la junte. Il s’envole pour l’Argentine à la rencontre d’un de ces enfants devenu adulte, Ignacio Guttierez. Au cours d’entretiens enregistrés, Ignacio dévoile son histoire au journaliste, la vie avec ses parents et grands-parents, son arrivée à Buenos Aires, comment il a été séparé de sa famille, la disparition du père et de la mère, son placement/adoption chez le colonel Guttierez et les années passées chez eux. Puis la fin de la junte et la fuite des militaires. S’ensuit pour le jeune garçon/homme une recherche d’identité et la découverte au Paraguay d’un frère, Abel, qu’il va tenter de joindre.

Mon avis :

Un nouveau livre de Christophe Léon, qui se dévore. Enfin, pas si « nouveau » que ça, puisqu’il est sorti aux éditions Oskar en 2011.

L’histoire d’Igniacio / Pablo est doublement intéressante. Du point de vue de l’histoire, on est captivé par ce personnage, on a envie de découvrir ce qu’il s’est passé pour lui, et on ne peut pas s’empêcher de tourner les pages. Mais elle l’est aussi d’un point de vue historique, puisque le livre parle d’un fait qui a existé : en 1976, en Argentine, un coup d’état renverse le pouvoir en place qui tombe aux mains de la junte militaire. Les opposants sont arrêtés, tués (certains sont jetés, drogués, dans la mer, depuis un avion) alors que des enfants sont arrachés aux mains des parents pour être élevés par les familles des militaires.

L’écriture est fluide, quelque peu différente des écrits récents de l’auteur que je connais mieux (son écriture s’est affinée, elle a plus de piquant maintenant), mais ça reste un régal à lire. On suit les années noires de la dictature, l’éducation nouvelle que suit Ignacio, parfois violente, ses rapports avec ses parents adoptifs. Et puis, comme lui, on se pose une question, à la réponse très difficile : quels sentiments ressentir face à eux ?  Peut-on avoir un peu de sympathie, voire plus, pour les meurtriers de nos parents ? Comment retrouver son identité ? J’ai apprécié que la fin soit ouverte, ce qui laissera libre cours à l’imagination des lecteurs.

Un roman à découvrir, dès 13 ans !

D’autres romans de l’auteur :

Fani

Hoax

[Jeunesse / YA] Fani, Christophe Léon

Présentation :

Bac en poche, Fani, 17 ans, « monte » à Paris pour poursuive des études supérieures. À la recherche d’un petit boulot pour payer sa colocation, elle rencontre Flore, une vieille dame aisée. Fani sera sa mamy-sitter du samedi. Jusqu’au jour où tout bascule…

Mon avis :

Entre Fani (joli prénom, non ? :p) et Flore, le coup de foudre n’est pas tout de suite au rendez-vous. Il faut dire que Fani n’avait pas prévu d’être appelée par une grand-mère quand elle a déposé, un beau matin, une annonce à la boulangerie de son village pour proposer ses services en tant que baby-sitter.

La première rencontre n’a pas été une franche réussite. La seule envie de Fani était de fuir les lieux, alors que Flore était persuadée d’avoir rencontré la personne idéale. Et, surtout, Fani n’a pas tout de suite compris ce qu’elle faisait là : où étaient les enfants ? Finalement, Flore lui avouera la raison de son appel : elle aimerait que Fani passe les samedis en sa compagnie, en échange d’une rémunération plutôt encourageante : 250 euros par samedi. Si le besoin d’argent pousse Fani à vouloir accepter l’offre, l’idée de se coltiner toute une journée une vieille dame ne la fait pas rêver. Flore parviendra finalement à la convaincre.

Flore est une grand-mère solitaire, qui souffre de l’absence de sa famille.

Fani est une jeune adolescente mal dans sa peau, qui préfère se camoufler que d’être dans la lumière, qui se laisse porter par sa vie.

Ces samedis transformeront les deux femmes, surtout Fani, bien plus qu’elle n’aurait pu l’imaginer. Et pas seulement à cause de Flore. Une rencontre bouleversera la routine qui s’est installée entre les deux femmes : Simon, le fils de Flore.

Au programme : de l’amour, de l’amitié, des rencontres, de la manipulation, le regard de l’autre… J’ai aimé ce livre, lu en deux soirées. L’histoire est intéressante et crédible, les personnages attachants. J’ai aimé l’évolution de ces derniers, j’ai eu peur pour Flore, puis pour Fani. L’histoire a pris au cours de la lecture une direction à laquelle je ne m’attendais pas, et je n’ai pu lâcher le livre avant de savoir comment allaient Fani et Flore. Une belle réussite !

Seul bémol (je chipote) : je me suis emmêlée les pinceaux au début en lisant le nom de « Françoise Duvauchelle », alors qu’avant et après le narrateur ne parle que de « Fani », à quelques exceptions près. Si on comprend qu’elles ne sont qu’une seule et même personne et que Fani est le surnom du personnage, surnom donné par son père, je n’ai pas compris l’intérêt de ne pas appeler tout simplement le personnage « Fani », mais j’ai dû louper un truc.

D’autres romans de Christophe Léon :

[Jeunesse / YA] Des cailloux à ma fenêtre, Jessie Magana

[Jeunesse / JA] Hoax, Christophe Léon

D’autres romans publiés aux éditions Oskar :

[Jeunesse] Ils veulent tuer Henri IV, Isabelle Wlodarczyk

[Jeunesse] Je suis boloss, mais je me soigne, Arthur Ténor

[Jeunesse] 20 ans pour devenir Nelson Mandela, Rolande Causse

[Jeunesse] Nous sommes ceux du refuge, Delphine Laurent

Les larmes de la maîtresse, Véronique Delamarre Bellégo

[Jeunesse] Les mangues resteront vertes, Christophe Léon

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Présentation :

1975 : Odélise a dix ans lorsque, peu avant la saison des mangues, elle est arrachée à sa famille et à son île de La Réunion avec une centaine d’autres enfants. Elle est envoyée en métropole dans une famille d’accueil de la Creuse. Pour lutter contre le chagrin, l’isolement, mais aussi le froid et le déracinement, Odélise s’invente un double, Zeïla, qui ne la quittera plus.

Mon avis :

Voici un livre que j’ai beaucoup aimé. Odélise menait une vie bien tranquille sur son île, auprès d’une famille heureuse et aimante, malgré leurs maigres moyens.Un jour, trois personnes, deux femmes et un homme, sont venues sur l’île de la Réunion et ont rassemblé plusieurs enfants, promettant à leurs parents de les prendre en charge et de les envoyer en métropole pour leur offrir une vie meilleure, arguant que les enfants méritaient bien cette offre. Odélise en faisait partie, mais elle pressentait déjà quelque chose :

« Quelque chose en moi m’avertissait d’un danger imminent. Mon ventre rognonnait. J’avais une boule dans la gorge et une terrible envie de faire pipi ». page 16.

Après quelques jours passés dans un orphelinat, où ses affaires ont disparu, elle finira par trouver une place auprès d’une famille à Saint-Valentin-la-Chavane et deviendra Odile, un prénom aux consonances moins exotiques : elle doit rentrer dans le moule. Elle devra y affronter le froid, les regards, le silence étrange de sa famille, la violence, sous des formes différentes et horribles. Alors, pour réussir à tout supporter, pour continuer à vivre, elle s’inventera un double, Zeïla.

Ce livre est frappant, j’ai été très touchée. On ne peut que se révolter à la lecture de l’histoire d’Odélise, un personnage certes de fiction mais l’histoire est basée sur une réalité historique : l’affaire des enfants de la Creuse. Sous l’autorité de Michel Debré, plus de 1600 enfants de la Réunion ont été emmenés dans des départements de la métropole, notamment la Creuse, victimes de l’exode rural. Si on leur a promis une vie meilleure, de toute évidence cela n’a pas été toujours le cas. L’histoire est parfaitement bien écrite, l’attention du lecteur ne faiblit pas, on est captivé du début à la fin.

En résumé : une histoire captivante, menée par une plume parfaitement maîtrisée. Un livre nécessaire.

Les « héroïques », qu’est-ce que c’est ?

C’est une nouvelle collection, dirigée par Jessie Magana (je vous parlerai bientôt de son dernier livre qui sort aujourd’hui aussi). Elle s’adresse aux enfants à partir de 13 ans, et aux adultes comme moi :). Le contexte historique présenté dans les livres est à la fois réel et contemporain. Et plus précisément, je vous cite leur présentation :

Les Héroïques, ce sont les femmes, au premier chef, mais aussi les enfants, les personnes handicapées, les immigrés, les colonisés… Ceux qui n’ont pas voix au chapitre dans les manuels d’histoire, dont on ne parle pas dans les médias, mais sans qui le monde ne serait pas ce qu’il est. Ce pourraient être nos grands-parents, nos parents. Ce pourrait être chacun d’entre nous.

J’aime beaucoup cette idée de collection, qui ne ressemble à aucune autre (me semble-t-il). Il est toujours intéressant de connaitre des moments de l’Histoire passées sous silence, comme celui des enfants de la Creuse que j’ai connu grâce au livre de Christophe Léon.

 

Les mangues resteront vertes sort aujourd’hui ! Plus d’informations sur le site des éditions Talents Hauts ou sur celui de l’auteur ! PS : le livre est soutenu par Amnesty International.

[Jeunesse / JA] Hoax, Christophe Léon

Quatrième de couverture :

Caroline Menez, professeur de français, prend sous son aile Kekili Zunu, jeune fille ayant fui le Togo avec sa famille.

L’enseignante remarque tout de suite que cette élève est brillante. Afin de la préparer au mieux au Bac de français, elle lui donne des cours particuliers chez elle. Il n’en faut pas plus pour que les bruits circulent. Leurs relations ne seraient pas seulement d’ordre scolaire. Caroline serait-elle vraiment amoureuse de son élève ? Jusqu’où la rumeur ira-t-elle ?

Mon avis :

J’ai lu quelques critiques négatives sur ce livre, le plus souvent à cause du thème qui dérange. Suggérer un amour entre un enseignant et son élève n’est déjà pas quelque chose qui plait, alors quand il s’agit d’une enseignante et d’une élève,  ça coince encore plus.

Contrairement à ce que laisse penser la quatrième de couverture, on sait dès le début où la rumeur conduit Caroline Menez, et ça nous glace le sang. Ce qui importe ici c’est le mécanisme : comment, à partir d’une simple rumeur, une professeur de français qui semble mener une vie tout ce qu’il y a de plus normal se retrouve à effectuer un acte aussi fou (oui, c’est écrit dès les premières pages, mais je ne dirai rien ici : j’ai trop apprécié la narration de  ce moment , c’est prenant, extrêmement bien décrit).

En tant qu’enseignante, je craignais une histoire invraisemblable, qui ne tienne pas la route, qui m’ennuie, tout en me disant qu’un livre écrit par Christophe Léon ne pourrait pas me déplaire.

J’ai dévoré ce livre (oui, je dévore beaucoup mes livres en ce moment, c’est bon pour la ligne !). C’est une histoire crédible. La rumeur se construit petit à petit, entremêlant éléments vrais ( Kekili se rend bien chez son enseignante)  et mensonges.

Le moment où la rumeur est lancé est plausible (une histoire de vengeance).

Caroline Menez, perturbée dans sa vie personnelle et professionnelle n’est pas capable de réagir comme il le faudrait, et elle en a conscience. Elle est complètement perdue, on aimerait pouvoir l’aider, la secouer, mais la fin est scellée.

C’est le premier livre que je lis sur le thème principal de la rumeur. Je trouve qu’il est important de montrer qu’une rumeur, lancée pour une raison idiote peut avoir des conséquences très lourdes, sans forcément aller jusqu’à la décision de Caroline Menez. A méditer.

Plus d’informations sur l’auteur sur son site.