[Jeunesse / YA] Des cailloux à ma fenêtre, Jessie Magana

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Présentation :

1940 : tous les pêcheurs de l’île de Sein sont partis rejoindre le général de Gaulle à Londres.
Sur l’île ne restent que les femmes, les enfants et les vieillards. Marie a seize ans. Quelques cailloux à sa fenêtre marquent le début de son engagement dans un réseau de résistants.

En parallèle, on suit le parcours de Jean sur un chasseur de sous- marins au large de l’Angleterre. Avec son meilleur ami, Pierre, ils vivent leurs premiers combats, entre peur et enthousiasme, jusqu’à ce que Jean tombe à l’eau lors d’une attaque.

Mon avis :

C’est la seconde guerre mondiale. Marie vit sur l’île de Sein, non loin de la Bretagne. Jean Guiller, jeune de seize ans, est parti combattre ou plutôt, au début du livre, attendre de combattre en Angleterre, suite à l’appel de de Gaulle. Il griffonne son histoire dans un carnet de bord. Et là-bas, il pense à Marie, qui lui manque. Cette jeune fille à laquelle il n’a pas déclaré son amour. Parfois, il parle d’elle avec son père, et les souvenirs le rendent heureux, jusqu’à ce que l’effet soit inversé. C’est sous les points de vue de ces deux personnages que nous lisons le roman. Le temps passe et rien n’est facile : les règles imposées par les allemands sont de plus en plus strictes, Marie ne veut pas attendre bien sagement que le temps passe. Alors, quand les premiers cailloux tapent à sa fenêtre, elle sent que le moment est venu. Elle découvrira les véritables dangers de la guerre, ses enjeux, mais aussi l’amour… De son côté Jean embarquera à bord d’un sous-marin.

L’écriture de Jessie Magana est fluide et très agréable à lire mais pourtant, j’ai eu du mal à rentrer dans le récit, sans savoir pourquoi exactement, j’ai pris plus de plaisir arrivée au tiers du livre, et plus on avance, plus je trouve qu’il gagne en intensité. Marie est une jeune fille épatante, courageuse, forte. Elle m’a impressionnée par son caractère et sa maturité. Jean m’a moins marquée, alors qu’il est l’un des deux narrateurs.

Le récit est intéressant car même si la seconde guerre mondiale n’est vraiment pas délaissée en littérature jeunesse, ici elle est traitée différemment. Les personnages principaux sont proches des lecteurs, ce sont les petites histoires de petits personnages, aux actions pourtant tellement importantes. Elle permet de voir l’histoire comme si on était à travers un petit trou de souris, on se retrouve là, assise auprès de Marie quand elle annonce à sa mère qu’elle doit partir, on marche avec eux quand ils cachent et distribuent les tracts, on tangue dans le bateau. Et ça, c’est vraiment le point fort de ce livre. On vit l’histoire, et ça marque.

C’est le deuxième livre publié dans la nouvelle collection « Les Héroïques », dirigée par Jessie Magana, l’auteur de ce livre. Le premier (enfin pour être plus précise ils sont sortis tous les deux le même jour) est celui de Christophe Léon dont je vous ai déjà parlé, Les mangues resteront vertes.

 

Retrouvez-le sur le site de la maison d’édition Talents Hauts !

[Jeunesse] Les mangues resteront vertes, Christophe Léon

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Présentation :

1975 : Odélise a dix ans lorsque, peu avant la saison des mangues, elle est arrachée à sa famille et à son île de La Réunion avec une centaine d’autres enfants. Elle est envoyée en métropole dans une famille d’accueil de la Creuse. Pour lutter contre le chagrin, l’isolement, mais aussi le froid et le déracinement, Odélise s’invente un double, Zeïla, qui ne la quittera plus.

Mon avis :

Voici un livre que j’ai beaucoup aimé. Odélise menait une vie bien tranquille sur son île, auprès d’une famille heureuse et aimante, malgré leurs maigres moyens.Un jour, trois personnes, deux femmes et un homme, sont venues sur l’île de la Réunion et ont rassemblé plusieurs enfants, promettant à leurs parents de les prendre en charge et de les envoyer en métropole pour leur offrir une vie meilleure, arguant que les enfants méritaient bien cette offre. Odélise en faisait partie, mais elle pressentait déjà quelque chose :

« Quelque chose en moi m’avertissait d’un danger imminent. Mon ventre rognonnait. J’avais une boule dans la gorge et une terrible envie de faire pipi ». page 16.

Après quelques jours passés dans un orphelinat, où ses affaires ont disparu, elle finira par trouver une place auprès d’une famille à Saint-Valentin-la-Chavane et deviendra Odile, un prénom aux consonances moins exotiques : elle doit rentrer dans le moule. Elle devra y affronter le froid, les regards, le silence étrange de sa famille, la violence, sous des formes différentes et horribles. Alors, pour réussir à tout supporter, pour continuer à vivre, elle s’inventera un double, Zeïla.

Ce livre est frappant, j’ai été très touchée. On ne peut que se révolter à la lecture de l’histoire d’Odélise, un personnage certes de fiction mais l’histoire est basée sur une réalité historique : l’affaire des enfants de la Creuse. Sous l’autorité de Michel Debré, plus de 1600 enfants de la Réunion ont été emmenés dans des départements de la métropole, notamment la Creuse, victimes de l’exode rural. Si on leur a promis une vie meilleure, de toute évidence cela n’a pas été toujours le cas. L’histoire est parfaitement bien écrite, l’attention du lecteur ne faiblit pas, on est captivé du début à la fin.

En résumé : une histoire captivante, menée par une plume parfaitement maîtrisée. Un livre nécessaire.

Les « héroïques », qu’est-ce que c’est ?

C’est une nouvelle collection, dirigée par Jessie Magana (je vous parlerai bientôt de son dernier livre qui sort aujourd’hui aussi). Elle s’adresse aux enfants à partir de 13 ans, et aux adultes comme moi :). Le contexte historique présenté dans les livres est à la fois réel et contemporain. Et plus précisément, je vous cite leur présentation :

Les Héroïques, ce sont les femmes, au premier chef, mais aussi les enfants, les personnes handicapées, les immigrés, les colonisés… Ceux qui n’ont pas voix au chapitre dans les manuels d’histoire, dont on ne parle pas dans les médias, mais sans qui le monde ne serait pas ce qu’il est. Ce pourraient être nos grands-parents, nos parents. Ce pourrait être chacun d’entre nous.

J’aime beaucoup cette idée de collection, qui ne ressemble à aucune autre (me semble-t-il). Il est toujours intéressant de connaitre des moments de l’Histoire passées sous silence, comme celui des enfants de la Creuse que j’ai connu grâce au livre de Christophe Léon.

 

Les mangues resteront vertes sort aujourd’hui ! Plus d’informations sur le site des éditions Talents Hauts ou sur celui de l’auteur ! PS : le livre est soutenu par Amnesty International.